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septembre 2008

Se mettre en ordre de bataille avant la tempête

Divers événements annoncent généralement les turbulences à venir, restructuration d’un marché, développe­ment d’une bulle économique ou financière, changement de modèle économique, etc. Se préparer à affronter les événements constitue la meilleure réponse.

Encore faut-il procéder avec méthode et viser des objectifs à la mesure des défis.

Un exemple vécu en apporte l’illustration.

En 2007, une entreprise industrielle française qui réalise 12 G de chiffre d’affaires voit la concurrence de nouveaux acteurs grignoter ses parts de marché les plus rentables. Pour améliorer la quali­té de ses services, elle développe des systèmes d’information innovants, mais court-circuite de plus en plus l’entité interne responsable des projets informatiques avec un bud­get de 80 M par an, 350 salariés et 450 prestataires.

Cette entité peut-elle devenir performante, ou faut-il la démanteler pour externaliser tous les services informa­tiques ?

Sur le papier, la réorganisation est simple : il s’agit d’abattre 3 DSI organisées en silos par métiers (proces­sus du cœur de métier, processus commercial, proces­sus support - RH, finances, etc.) pour les réunir en une seule et mutualiser tout ce qui peut l’être. En effet, hormis quelques per­sonnes bien au fait des métiers des clients, le personnel est formé à la maî­trise d’œuvre technologique, où un chef de projet et une équipe compétente sur une technologie peuvent travailler pour n’importe quel processus métier.

Le dirigeant à l’origine de cette réorgani­sation sait qu’il ne peut réussir sans un appui extérieur et que le cabinet de stra­tégie chargé d’esquisser l’organisation cible n’a pas les compétences néces­saires à la mise en oeuvre.

Un cabinet de conseil en stratégie et en management, lui, apporte la réponse : son expérience en analyse stratégique lui permet de comprendre les objectifs et les motivations du client, son expertise en termes de mise en œuvre l’a préparé à affronter les freins, opérationnels, politiques et humains, au changement.

Surtout s’il dispose des outils de la sociodynamique, extrêmement puissants pour conduire ce type d’opérations.

Il lui faut aussi les convictions qui permettent de garder le cap sur la route sinueuse du changement :

  • l’attention aux motivations individuelles, car lors d’une réorgani­sation, les personnes se posent trois questions et trois seulement : “Et moi ? Et moi ? Et moi ?”,
  • la sensibilité à la culture de l’entreprise, car quels que soient les modèles d’organisation, la réussite impose de les adapter avec humilité pragmatisme au contexte,
  • la priorité des processus par rapport aux organigrammes, car ils sont les muscles et les organes de l’institution, qui sans cela n’est qu’un squelette inanimé,
  • la mise au point précise des conditions et des étapes de la mise en œuvre, car même si l’on a défini l’organisation, décrit les acti­vités, formalisé les processus, les opposants peuvent en changer l’esprit, parfois à 180°, tout en en respectant strictement la lettre,
  • le souci de ne pas se perdre dans les détails, pour conserver à l’esprit les éléments structurants, et n’entrer dans le détail qu’au cours de l’action,
  • le refus systématique des recettes prises à l’extérieur, car la valeur ajoutée du conseil tient à la capacité à faire accoucher des solu­tions qui existent au sein des équipes du client plus qu’à conce­voir ou transposer des solutions,
  • l’empathie qui permet de se mettre à la place du client et d’imaginer comment il opérera après la fin de la mission, sans jamais céder au “de toute façon je ne serai plus là après la fin de la mis­sion”, conscient ou subconscient,
  • l’attention permanente au pilotage, à la fois sur la trajectoire glo­bale, mais aussi sur des détails opérationnels clés (ceux où se loge le diable !), afin d’alerter la direction, de proposer des solu­tions et de suivre leur application, dans la lettre et surtout l’esprit.

Armé de ces convictions, qu’il prend soin de partager avec les diri­geants, le consultant et son équipe peuvent faire progresser l’organisation vers la cible.

Phase n°1 Prise de connaissance du contexte

Pour s’imprégner du contexte, le consultant doit mener autant d’entretiens que nécessaire, sur un panel représentatif du corps social : niveaux hiérarchiques, métiers ou sites géographiques.

Cette phase permet de comprendre le fonctionnement de l’entité, son histoire et sa culture, ses forces et ses faiblesses, mais aussi de dres­ser la carte des partenaires, document clé pour identifier les acteurs en présence et leur rôle, et définir pour chacun la stratégie appropriée.

Dans cette phase, il faut aussi déterminer avec les dirigeants les objectifs fondamentaux de la cible, les éléments macroscopiques structurants et les détails clés.

Phase n°2 - Définition de la cible

Cette phase permet de définir les processus, le rôle et les respon­sabilités des acteurs.

La définition de l’organigramme dimensionné fait aussi partie de cette phase, mais n’en est pas, et de loin, l’élément central.

Pour réussir à définir des processus robustes et fiables, il faut apporter de la connaissance, mais aussi et surtout utiliser la connaissance des équipes du client. C’est le meilleur moyen de réussir l’appropriation d’une nouvelle organisation.

Phase n°3 - Définition de la trajectoire et mise en œuvre de la nouvelle organisation

Une fois la cible définie, un nouveau Comité de Direction est nommé par le directeur, minimisant les perturbations de l’activité et les mécontentements.

Des principes simples sont posés :

  • la continuité d’activité prime sur les changements d’affectation,
  • des expérimentations sont choisies pour décliner la cible opérationnellement, pendant une durée d’observation définie à l’avance,
  • l’ensemble des collaborateurs internes sont affectés dans l’organisation à une date donnée, après avoir rencontré leur nouveau management.

À l’échéance fixée, tous les collaborateurs sont affectés conformé­ment à l’organisation-cible et ont rencontré leur nouveau respon­sable.

L’expérience montre que ce résultat peut être atteint sans mouve­ment social et sans perturbation d’activité.

La communication doit permettre de réduire pendant toute la durée de la mission l’angoisse des salariés, en présentant de manière parlante les changements induits par la nouvelle organi­sation sur les processus au cœur de leur métier.

Dans ces conditions, le cabinet de conseil en stratégie et en mana­gement apporte au dirigeant une contribution essentielle :

  • sa position externe à l’entreprise lui permet d’adopter une posi­tion neutre, libre de toute arrière pensée liée à la carrière,
  • sa spécialisation dans la transformation des organisations garan­tit une plus grande efficacité, permet de communiquer de façon claire et simple, et réduit les risques et les délais de mise en oeuvre, alors que les compétences du dirigeant sont plutôt foca­lisées sur le fonctionnement en croisière,
  • sa pratique d’une organisation méthodique, rigoureuse et serrée, contribue à mettre sous tension les équipes internes sans conflit dramatique.

Mais le dirigeant doit prendre des précautions qui ne sont pas ano­dines :

  • on n’abdique pas en “faveur' du consultant, les orientations et les décisions clés incombent au dirigeant,
  • l’équipe de conseil ne doit pas se substituer aux équipes internes, mais co-produire en bonne entente avec les éléments les plus constructifs,
  • au-delà des équipes, il faut bâtir dans le cadre historique et cul­turel de l’entreprise

“Plus vite, plus haut, plus fort', c’est bien là l’apport du consul­tant au dirigeant pour affronter des périodes troublées. ■

 

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