Depuis quelques années, les évolutions en matière d’urbanisme se sont appuyées sur des innovations technologiques qui ont fait de la ville une « smart city ». Or, quand on parle d’urbanisme, on démarre souvent par une réflexion sur la mobilité. En la matière, l’avènement et la progression phénoménale des smartphones ont permis l’apparition de nouveaux modes de déplacement, comme les vélos en libre-service ou leurs équivalents motorisés.
Mais l’innovation n’a en réalité porté que sur l’accès à un objet déjà largement connu : la voiture, le vélo, la trottinette, etc. Le véhicule en lui-même et son mode de déplacement étaient quant à eux restés grosso modo inchangés. De même, le projet du Grand Paris express, régulièrement décrit dans ces pages (RI 471, RI 491, RI 496), et qui a servi de base à la mise en place du projet Métropolitain du Grand Paris, ne propose aucune révolution dans sa manière d’aborder la mobilité, il impressionne surtout par les ressources qu’il mobilise et les objectifs ambitieux qui l’accompagnent.
Mais en réalité, il s’agit quand même simplement d’un métro… Rien de très futuriste dans tout ça !
Une question pour les ingénieurs
Alors, de quoi sera donc fait le futur de la mobilité ? En voilà une question pour des Ingénieurs !
Et pour le coup, c’est bien vers les ingénieurs que la société civile se tourne désormais.
Nous en voulons pour preuve la multiplication des appels à projets des collectivités publiques vers la sphère privée.
Inventer (la Métropole du Grand Paris…), Ré-inventer (Paris), Re-inventing (cities) : autant de mains tendues de la part des pouvoirs publics vers des innovations portées par les entreprises.
Parmi ces « appels » (à l’aide ?), l’un d’entre eux concernait les « Routes du futur du Grand Paris ». Lancé par le Forum Métropolitain, il ambitionne de porter une réflexion globale et prospective sur le réseau routier du Grand Paris (auto-routes, boulevard périphérique, voies rapides ou structurantes), en s’appuyant sur des équipes d’architectes, urbanistes, paysagistes, experts en mobilité, économistes, etc., pour penser le réseau routier de demain, de 2030 à 2050.
La question des mobilités du futur est donc bien au centre des débats urbanistiques, et des perspectives commencent à apparaître.
Une conférence Intermines
C’est fort de ce constat que deux clubs professionnels d’Intermines, Mines Aménagement & Construction et Mines Solutions Services, ont organisé en décembre dernier une conférence dans les locaux de Mines ParisTech sur le thème des « Mobilités du futur ».
Grand témoin de cet événement, Jean-louis Missika, Adjoint à la Maire de Paris en charge de l’Urbanisme, des projets du Grand Paris, du développement économique et de l’attractivité, et auteur de nombreux ouvrages dont le récent « Des robots dans la ville » a exprimé sa conviction que la voiture autonome fera partie, grâce notamment aux progrès de l’intelligence artificielle, des leviers qui permettront un changement véritable dans nos manières de nous déplacer et de vive ensemble.
Il était accompagné, lors de cette table ronde, de Jean-Pierre Orfeuil (P68), Ingénieur des Mines et urbaniste spécialisé dans les mobilités urbaines. Vous retrouverez dans les pages suivantes sa contribution au débat. Vous y lirez notamment comment il nous incite, nous ingénieurs, à « garder les pieds sur terre » pour éviter les désillusions futures (non, nous ne voyagerons pas tous à des vitesses mirobolantes demain grâce à une hypothétique « hyperloop »…).

Et, comme exemple concret d’un projet de nouvelle mobilité qui se donne le temps et les moyens de prouver (ou non ?) sa viabilité avant de crier sur les toits des media qu’il va révolutionner le transport, Jean-Philippe Mangeot, professeur à l’Université de Lorraine, était présent pour présenter Urbanloop. Ce système de déplacement innovant, basé sur des capsules circulant au sein de boucles urbaines, est développé en partenariat avec quatre écoles d’ingénieurs, dont l’école des Mines de Nancy. De nouveau, l’ingénieur se positionne à l’origine d’un modèle potentiellement disruptif…
Mais, si les technologies émergentes permettent d’envisager de nouvelles manières de se déplacer à l’échelle d’une ville ou d’une métropole, en s’affranchissant notamment de la notion de chauffeur, elles autorisent aussi à imaginer de nouveaux circuits de déplacement à l’échelle des bâtiments.
En effet, aux côtés de Jean-Louis Missika, les experts de ThyssenKrupp accompagnés par l’architecte Jean-François Winninger, des Ateliers Jean Nouvel, ont présenté une innovation potentiellement révolutionnaire en matière d’ascenseur puisque celui-ci s’affranchit de ses câbles pour se déplacer grâce à un système de sustentation magnétique, avec pour conséquence de lui offrir des hauteurs de déplacement nettement plus élevées (et donc des tours plus hautes), mais surtout de lui permettre des mouvements horizontaux et non plus uniquement verticaux. Quel impact ce passage à deux dimensions aura-t-il sur l’architecture des bâtiments du futur ? Les pages suivantes vous livreront quelques pistes sur la base d’expérimentations déjà à l’œuvre.
Ce dossier, vous l’aurez compris, se veut une prolongation des débats qui se sont tenus lors de la conférence de décembre dernier. Il n’a pas pour ambition de décrire de manière exhaustive et détaillée toutes les formes de mobilités du futur, mais simplement de faire prendre conscience des enjeux urbains majeurs liés à ces révolutions techniques. Ou, en d’autres termes, d’illustrer la manière dont l’ingénieur est à l’œuvre pour réinventer la ville. ■
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