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20 janvier 2022

L'energie, c'est compliqué

Libre propos de Jean-Frédéric Collet (N68)

 Pour mémoire les opinions exprimées dans la News des Mines n’engagent que leurs auteurs.

Dans les semaines qui viennent, et quand on en aura fini avec les histoires de grand remplacement et autres zemmouritudes, d’autres sujets viendront en débat, et en premier lieu la lancinante question de l’énergie dans nos sociétés. Risquons un panorama sommaire de la question, abordée par ses sources.

 Les énergies renouvelables (solaire et éolien pour faire simple) sont le secteur le plus controversé : leurre pour les uns, nec plus ultra pour les autres. La question de leurs nuisances, paysagères par exemple pour l’éolien, ne peut être évacuée d’un revers de main. Et l’évaluation de leur efficacité globale ou de leur coût réel donne lieu à des contradictions qui donnent une impression d’amateurisme et mettent en évidence le besoin de travaux sérieux, et qui puissent faire consensus – sans doute l’AIE (Agence Internationale de l’Énergie) dispose-t-elle d’éléments qu’il serait intéressant d’aller éplucher.

 Les énergies fossiles, ensuite. Indépendamment des nuisances qui vont avec, leur caractère non renouvelable est une évidence ; ensuite c’est une question d’échelle. Quel rapport de temps faut-il entre la constitution d’un gisement de pétrole et sa consommation, je n’ai pas été voir, mais c’est sûrement dix puissance beaucoup. Donc il y a une limite quelque part.

 L’énergie nucléaire enfin : il semble qu’il y ait un tabou là-dessus. Tout le monde semble partir du principe, implicite, que la part du nucléaire dans la production d’électricité doit être réduite : de 75 % à 50 puis 25 %, mais à quel horizon ? Nous avons le nucléaire honteux : il vaudrait mieux du nucléaire assumé, ou pas de nucléaire du tout (comme nos voisins allemands, dont on est tout de même curieux de savoir où ils en seront dans 15 ou 20 ans). Car de deux choses l’une : ou l’énergie nucléaire est économiquement la plus efficace et ses risques sont acceptables, dans ce cas sa part optimale dans le mix électrique est de 100 % ; ou ses risques ne sont pas acceptables, et sa part optimale est 0.

Les risques sont en gros de deux natures. D’abord les risques d’accidents (Three Mile Island, Tchernobyl, Fukushima…) : sauf gros trucs cachés - ce qui n’est pas complètement exclu ici ou là -, cela reste du ressort de l’accidentel, comme pour n’importe quelle autre source. La gestion des déchets, ensuite. C’est le problème le moins bien maîtrisé (traitement, enfouissement ?). Il n’est pas a priori stupide de faire un pari sur l’avenir. Une analogie saute aux yeux : il y a à peine plus d’un an, à l’automne 2020, on en était à faire des hypothèses sur la date à laquelle un vaccin anti-Covid serait disponible. On était encore dans le brouillard complet. Aujourd’hui la majeure partie de la population est vaccinée ou a la possibilité de l’être. Il n’y a pas de raison que des recherches correctement pilotées ne fassent pas avancer la question du traitement des déchets nucléaires.

La production d’énergie est un aspect, sa consommation en est un autre, au moins aussi important. C’est toute la question de la sobriété énergétique et de ce que cela implique en termes de modes de vie. Là, le débat n’est pas près de s’éteindre – il serait même temps qu’il commence vraiment.

 Tout ceci est très simplifié, voire simpliste, et n’a d’autre ambition que de planter un décor qu’il faut affiner et enrichir. A vos palettes, à vos pinceaux ! Van Gogh et Corot n’ont qu’à bien se tenir.

  

Nota- certains chiffres sont approximatifs, c’est plutôt une invitation au lecteur à creuser la question. Pédagogie et paresse ne sont pas forcément incompatibles.